Comme la nostalgie abonde de souvenirs, de références, de comparaisons pour démontrer qu’il n’y a « plus de saisons », empressons-nous de la prendre au mot en saluant l’arrivée tardive du printemps !
Exhumons de nos vieux manuels scolaires une belle récitation écrite par un poète noblement engagé, historien oublié, membre très discret, — parmi tant d’autres méconnus —, de l’Académie française.
Et mettons en musique la saison nouvelle sous la mélodie légère, — un rien goguenarde —, de l’éternel Léo Ferré…
Le printemps
Déjà les nuits d’hiver, moins tristes et moins sombres,
Par degré de la terre ont éloigné leurs ombres,
Et l’astre des saisons, marchant d’un pas égal,
Rend au jour moins tardif son éclat matinal.
Avril a réveillé l’aurore paresseuse ;
Et les enfants du nord, dans leur fuite orageuse,
Sur la cime des monts ont porté les frimas.
Le beau soleil de mai, levé sur nos climats,
Féconde les sillons, rajeunit les bocages,
Et de l’hiver oisif affranchit ces rivages.
La sève emprisonnée en ses étroits canaux,
S’élève, se déploie, et s’allonge en rameaux ;
La colline a repris sa robe de verdure ;
J’y cherche le ruisseau, dont j’entends le murmure ;
Dans ces buissons épais, sous ces arbres touffus,
J’écoute les oiseaux, mais je ne les vois plus.
Des pâles peupliers la famille nombreuse,
Le saule ami de l’onde, et la ronce épineuse,
Croissent au bord du fleuve, en longs groupes rangés :
Dans leur feuillage épais les zéphyrs engagés
Soulèvent les rameaux, et leur troupe captive
D’un doux frémissement fait retentir la rive.
Le serpolet fleurit sur les monts odorants ;
Le jardin voit blanchir le lis, roi du printemps ;
L’or brillant du genêt couvre l’humble bruyère ;
Le pavot, dans les champs, lève sa tête altière ;
L’épi cher à Cérès, sur sa tige élancé,
Cache l’or des moissons dans son sein hérissé ;
Et l’aimable espérance, à la terre rendue,
Sur un trône de fleurs du ciel est descendue.
Joseph MICHAUD
MICHAUD (1768-1846) nous a laissé un grand nombre de productions qui portent toutes le cachet d’un grand écrivain. Son Histoire des Croisades est un des plus beaux monuments historiques que nous possédions. Michaud fut membre de l’Académie.
Cf. lien ad hoc — http://www.academie-francaise.fr/les-immortels/joseph-michaud
In ANDRÉ (M. Ph.) — Trésor de la Jeunesse — Nouveau recueil de morceaux choisis en vers et en proses (Paris, Librairie classique de F.E. André-Guédon Éditeur, 8e édition, 1879)
Source : GODIER (A.) & MOREAU (M. et Mme S.) — Premier livre de leçons de choses – Exercices d’observation —cours élémentaire —
(Paris, Fernand Nathan éditeur, 1954)
LEO FERRE - C'est le printemps / La solitude par l0ve_0n_the_beat