Comme nostalgie et tradition ont partie liée, respectons leur complicité en cette période de fêtes et sacrifions au rite de la récitation de Noël que ce blog perpétue depuis sa création.
Cette année encore, c’est un « hussard noir de la République », poète à ses heures, que nous choisissons d’honorer pour mieux conjurer l’oubli de son œuvre.
Affublé d’un surnom quelque peu narquois — « le Poète des Chaumes » —, chantre de la butte Montmartre et du quartier Saint-Germain, il connaît un succès d’estime grâce à son premier recueil de poèmes, Dehors, publié en 1900.
Renouant avec sa Normandie natale où il embrasse une carrière d’instituteur, il publie d’autres poésies, la plupart inspirées de son terroir, ose commettre quelques pièces de théâtre et conquiert une reconnaissance tardive en barde du bocage, érudit du parler normand et mémoire vivante des légendes hantant le pays de Caux.
Sa poésie « Noël rustique » n’oublie rien du folklore familial de la plus belle nuit de l’année, restituée là au gré de ses souvenirs d’enfant : le réveillon, la bûche, l’âtre de la cheminée, la crémaillère, les chants sacrés, l’impatience des enfants… Des émotions intimes qui savent, aujourd'hui encore, résister à la triviale fièvre consumériste de notre siècle désenchanté.
Noël rustique
La bûche de Noël
C’est le cœur du foyer.
Quand j’étais jeune comme toi,
Ma petite fille si belle,
On mettait, le soir de Noël,
Dans l’âtre un beau rondin de bois
Pour les trois fêtes solennelles :
Noël, le Jour de l’an, les Rois.
Enfance chère aux cœurs fidèles,
Beaux réveillons ! je me rappelle,
Nul ne songeait à sommeiller.
Le feu dansait devant la bûche
Tout le long de la crémaillère
— Il semble que c’était hier… —
On chantait, on vidait les cruches,
Le bonheur de la maisonnée
Nous venait de la cheminée.
Le feu semblait se réveiller
Dans sa flamme claire et nouvelle
Pour souhaiter la bonne année.
La nuit des Rois, devant le feu,
On tirait le gâteau des Rois ;
Et l’on donnait la part à Dieu
Aux petits enfants qui ont froid ;
Ils chantaient avec trois chandelles,
Comme on chante encore maintenant…
Ma petite fille si belle,
Ce sont des souvenirs d’enfant
Qu’il ne faut jamais oublier.
La bûche de Noël
C’est le cœur du foyer.
Francis YARD — Le roi Octobre (Paris, Grasset éditeur, 1930)

Un vieux manuel d’initiation au jeu d’échecs sourit toujours à la nostalgie. Parce qu’il suffit d’en tourner les pages pour réveiller en nous les souvenirs du joueur débutant, hésitant et étourdi que nous fûmes au moment d’assimiler les règles élémentaires du noble jeu.

Pourquoi, nostalgie aidant, le manuel scolaire devrait-il faire écho aux pseudo-débats de société qu’agite le microcosme politicien ? La polémique que Najat Vallaud-Belkacem, la télégénique ministre des Droits de la femme, vient d’ouvrir en s’étonnant du silence de nos livres d’histoire sur l’orientation sexuelle de nos héros nationaux illustre bien l’étrange valeur totémique que l’intelligentsia socialiste accorde au contenu des manuels scolaires.
