Comme la nostalgie adore radoter qu’il n’y a « vraiment plus de saison », risquons-nous à célébrer le printemps avec la prudence qu’il commande.
D’ailleurs peut-on vraiment faire confiance au mois de mars, avec ses trente-et-un jours capricieux qui s’amusent à déjouer tous les dictons ?
Selon les années, il donne l’impression d’un retour à l’hiver. Ou alors il installe durant quelques jours un avant-goût de l’été, si promptement qu’il donnerait presque du grain à moudre aux prophètes aguerris du réchauffement climatique.
Assez d’inconstance et de déconvenues pour alimenter les seules conversations qui ne fâchent personne : parler de la pluie et du beau temps.
Déconcertant, Insaisissable, imprévisible, mars a quand même le mérite de décréter à lui tout seul que l’hiver est dernière nous. Une façon comme une autre pour nous abandonner à des « pensées positives », celles que la nature met en éveil, tel un éternel recommencement. Preuve en vers avec cette poésie gentiment médiévale qui, en notre XXIe siècle si blasé, a su garder son charme intact. Raison suffisante pour le (ré)apprendre par cœur !
Le Printemps
Le temps a laissé son manteau
De vent, de froidure et de pluie,
Et s’est vêtu de broderie,
De soleil luisant, clair et beau.
Il n’y a bête et oiseau
Qu’en son jargon ne chante ou crie :
« Le temps a laissé son manteau
De vent, de froidure et de pluie. »
Rivière, fontaine et ruisseau,
Portent en livrée jolie
Gouttes d’argent d’orfèvrerie.
Chacun s’habille de nouveau ;
Le temps a laissé son manteau
De vent, de froidure et de pluie.
Charles d’ORLÉANS
Charles d’ORLÉANS (1394-1465)
Au cours de sa longue captivité aux mains des Anglais, ce fils de Louis 1er, duc d’Orléans — frère de Charles VI, roi de France — s’adonne à la poésie, une passion que lui avait léguée sa mère, Valentine de Milan.
La tradition l’érige en héritier de la tradition courtoise des trouvères.
En vingt-cinq ans de détention, il rédigea plus de six cents œuvres, riches de chansons, ballades, complaintes et rondeaux.
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Source: Cours SCHWEITZER — Album de planches en couleur (Paris, Librairie Armand Colin, 1908)